Lait de soja : déconseillé chez les nourrissons
Les préparations pour nourrissons à base de protéines de soja (1er âge et laits de suite) représentent en France 2,1% de la consommation des laits infantiles. Mais cette proportion atteint déjà les 25% aux Etats-Unis. Ces laits de soja contiennent des quantités élevées d'isoflavones, également appelées phytoestrogènes, soit 18 à 47 mg par litre, alors que le lait maternel et le lait de vache n'en contiennent que de petites quantités, soit respectivement 0 à 32 μg par litre et 0,1 à 5 μg par litre. Un nourrisson de 4 mois, alimenté exclusivement avec une préparation à base de protéines de soja, peut ainsi recevoir 4 à 9 mg d'isoflavones par kilo et par jour, alors qu'on recommande de ne pas dépasser 1 mg par kilo et par jour. Or de nombreux travaux expérimentaux montrent que les phytoestrogènes ont des effets sur le développement et le fonctionnement neuroendocrinien et immunitaire dans différentes espèces animales. Des répercussions sur l'installation de la puberté, la fertilité et sur le fonctionnement thyroïdien ont également été constatées chez l'animal. Jusqu'à présent, aucune conséquence particulière sur la croissance et le développement endocrinien n'a été observée chez des nourrissons ayant été nourris au lait de soja. Toutefois, on ne dispose pas d'études à long terme, ce qui laisse la place à des incertitudes concernant les effets au long cours de fortes doses ingérées de façon prolongée et très répétée par les nourrissons.
L'Afssa met donc en garde et déconseille l'emploi de ces préparations depuis la naissance jusqu'à l'âge de trois ans. Parallèlement, elle recommande de réduire la teneur en isoflavones des laits à base de protéines de soja et de contrôler les apports journaliers.
Si les laits de soja sont classiquement employés en cas d'allergie aux protéines de lait de vache, ils sont de plus en plus utilisés pour l'alimentation des nourrissons non allergiques. Or les protéines de soja peuvent, elles aussi, être responsables d'allergies. L'Agence précise que l'appellation « lait de soja » est désormais remplacée par « jus de soja », afin que l'on ne se méprenne pas sur les qualités nutritionnelles de cette boisson, dont la composition est très différente de celle du lait maternel ou des laits maternisés. Le jus de soja est notamment « dépourvu de l'ensemble des minéraux et vitamines contenu dans le lait (maternel ou de vache) ».
Réaction du Dr Etienne Bidat, pneumopédiatre et allergologue, au communiqué de l'Afssa.
Faut-il avoir peur des isoflavones chez le petit nourrisson ?À la fin des années 90 une abondante littérature mettait en garde contre le contenu en isoflavones des laits de soja. Ainsi chez sept nourrissons âgés en moyenne de 4 mois et nourris au lait de soja, l'exposition aux isoflavones est 6 à 11 fois supérieure par kilogramme de poids à la dose qui a un effet hormonal chez l'adulte qui consomme du soja. Chez ces nourrissons, le taux circulant d'isoflavones est 13.000 à 22.000 supérieur à la concentration plasmatique d'oestradiol à cet age. Ce taux élevé pourrait être responsable d'effet biologique (1). L'analogie des isoflavones avec les oestrogènes fait redouter des effets secondaires cliniques. Dans les études à court et moyen terme, il n'a pas été montré d'effet clinique, et la tolérance des laits à base de soja est excellente chez les petits nourrissons, néanmoins certains souhaitent un suivi prolongé, jusque l'âge adulte, de ces enfants nourris par ces laits (2). On remarque toutefois que chez des générations entières d'Américains nourris au lait de soja, il ne semble pas exister, à l'âge adulte, de troubles du développement sexuel ou de la fertilité.(1) Setchell KD, Zimmer-Nechemias, Cai J, Heubi JE. Exposure of infants to phyto-oestrogens from soy-based infant formula. Lancet 1997 ; 350 : 815_816.(2) Mendez MA, Anthony MS, Arab L. Soy-based formulae and infant growth and development : a review. J Nutr 2002 ; 132 : 2127-2130.
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