Migraine : une nouvelle piste de traitement préventif
Une douleur pulsatile, persistante, accompagnée d'une hypersensibilité aux sons. La migraine est un calvaire pour un Français sur cinq. Mais jusqu'ici, aucun traitement spécifique à ce trouble neurologique n'existait. La situation pourrait évoluer, si l'on en croit deux études parues dans le New England Journal of Medicine. Deux anticorps, développés contre cette affection, livrent des résultats encourageants.
Le King's College de Londres (Royaume-Uni) et l'université Thomas-Jefferson (Philadelphie, Etats-Unis), à l'origine de ces travaux, ont adopté la même stratégie face aux migraines : cibler une molécule exprimée lors des crises, CGRP (Calcitonin gene–related peptide). Elle est responsable de la douleur mais aussi de l'hypersensibilité aux stimuli sonores, visuels ou olfactifs. En inhibant ce peptide, les chercheurs espéraient mettre fin au cycle vicieux.
Au Royaume-Uni, l'erenumab a été injecté chaque mois à plus de 600 patients souffrant de migraine épisodique - c'est-à-dire ayant souffert moins de 15 jours par mois. Au bout de 20 semaines, le succès est manifeste. En moyenne, les volontaires déclarent trois jours de crise en moins par mois. La moitié a même vu le nombre d'épisodes divisé par deux. Ce qui ne s'observe pas chez les participants qui ont reçu un placebo, en guise de contrôle.
La fin du calvaire
"Ces résultats témoignent d'une réelle évolution pour les patients migraineux, se félicite Peter Goadsby, princial auteur de l'étude britannique. Nous laissons les médicaments dont l'indication a été ré-orientée et dont l'effet est mal compris pour adopter un traitement spécifique de la migraine."
Les conclusions sont tout aussi enthousiasmantes de l'autre côté de l'Atlantique. Les chercheurs de Philadelphie se sont, eux, penchés sur des personnes souffrant de migraines chroniques - dont les crises se manifestent plus de 15 jours par mois. Et là aussi, les anticorps injectés ont eu un effet majeur sur l'état de santé des volontaires.
Les 1 100 personnes qui ont reçu les injections de fremanezumab ou de placebo se sont moins plaintes de douleurs. Certaines les ont même vu disparaître. En moyenne, 4 jours de migraine en moins ont été signalés. L'effet varie légèrement selon que le traitement est administré tous les mois ou tous les trois mois.
30 % de migraines résistantes
Ces bénéfices se ressentent aussi sur la qualité de vie : nombre de participants avouent avoir repris des activités quotidiennes et se sentir physiquement mieux. "Cette approche thérapeutique donne de l'espoir aux personnes souffrant de migraine qui n'ont pas réussi à obtenir un traitement efficace", s'enthousiasme Stephen Silberstein, principal auteur du volet américain de l'étude. Et pour cause : environ 30 % des patients résistent aux différentes approches.
L'espoir est d'autant plus permis que les anticorps provoquent peu d'effets secondaires lourds. Si plus d'un volontaire sur deux s'en plaint, les plus fréquents concernent surtout une irritation au niveau de la zone d'injection. Et peu de volontaires ont décidé d'arrêter l'étude à cause d'eux.
Reste à transformer l'essai en confirmant ces bons résultats sur de larges populations. Les enjeux sont majeurs car à ce jour, aucun traitement spécifique de la migraine n'est disponible. Anti-épileptiques, beta-bloquants et d'autres médicaments peuvent être administrés en prévention. Mais leur efficacité est variable et les effets indésirables parfois pénibles.
La migraine expliquée en vidéo
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"Fremanezumab for the Preventive Treatment of Chronic Migraine", S. Silberstein et al., N Engl J Med 2017; 377:2113-2122