Témoignage : "j'ai débuté ma vie de femme à 53 ans"
Céline Audebeau : “je devais devenir celle que je voulais”
Lorsqu’on est assis à la table de Céline Audebeau, il ne fait aucun doute qu’elle est une femme pleine d’énergie, joviale et spontanée. Pourtant, cette sérénité est assez récente pour cette expatriée et PDG d’une usine de 420 personnes au Vietnam. Il y a deux ans, elle était le secret de Christophe.
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Chirurgie du vagin, des lèvres, de l'hymen : mode d'emploi“C’est à l'âge de 5 ou 6 ans que j’ai compris que quelque chose ne fonctionnait pas correctement, j’ai été catalogué dans la rubrique “homme” alors que l’autre me plaisait bien davantage”.
Comme de nombreuses personnes transgenres ayant grandi avant l’ère d’Internet et de la libération de la parole, le petit Christophe n’avait rien dit de son mal-être, persuadé d’être la seule personne sur terre à ne pas se sentir dans le bon “genre”. Pendant des décennies, sa chambre était le seul lieu où Céline pouvait avoir un semblant de vie féminine.
Mais cette double vie est devenue impossible après un important problème de santé. “Il y a 12 ans, j’ai dû me faire retirer la thyroïde. Elle faisait 1,3 kg. S’il n’y a pas eu de problème au moment de l’opération, la nuit suivante j’ai fait une hémorragie interne avec arrêt cardiaque et respiratoire. On m’a récupéré de justesse”, se souvient Céline.
“Je n’ai pas vécu cela comme quelque chose de négatif. Cela m’a permis d’appréhender la mort et je l’ai saisi comme une seconde chance. Je me suis dit alors que je devais être celle que je voulais”.
“Pendant 53 ans, j’avais fait tellement attention aux autres, essayer de les épargner. Il fallait désormais que je pense à moi”.
C’est ainsi que la transition d’homme vers femme est devenue une évidence pour elle.
Une transition préparée en deux ans
Celui encore connu uniquement sous l’identité de Christophe, a ainsi débuté ses recherches sur la transition : traitements hormonaux, opérations, suivi thérapeutique… Il a petit à petit dessiné le parcours médical à venir.
“Les endocrinologues présents au Vietnam ne connaissaient pas forcément les prescriptions d’hormones nécessaires. J’ai ainsi fait mon traitement toute seule : ce qui n’est pas vraiment recommandable. J’expliquai à mon médecin ce qu’il devait vérifier, les prises de sang à faire. Il a appris en même temps que moi”, se rappelle Céline Audebeau.
L'équipe médicale créée par ses soins, était aussi composée d’une psychologue et d’une orthophoniste. “Il y avait bien sûr un travail sur le physique, mais aussi sur la voix. C’était important pour moi de ne pas être trahie par la voix. Mon orthophoniste aimait à dire que la voix est le reflet de l’âme”.
Après deux ans sous traitement hormonal de substitution (TSH), le corps avait débuté sa transformation. “Les seins sont apparus rapidement. Puis, je n’ai plus eu de libido, plus d’érection. La vie sexuelle est alors complètement effacée”. Cette période a aussi donné le temps à la quinquagénaire de faire un travail sur elle nécessaire.
“Lorsque j’ai commencé le traitement, je ne pensais pas du tout aux opérations. Cela me semblait inaccessible à cette époque. Les choses se sont décantées avec la psychologue avec qui j’en ai parlé à voix haute pour la première fois”.
Toutefois avant de franchir le pas important du changement de genre, la chef d’entreprise a dû prévenir ses supérieurs, ses employés ainsi que sa famille “J’ai eu beaucoup de chance tout mon entourage a bien accepté”.
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