Enfants et grands-parents, des liens à réinventer
PsychoEnfants : Les grands-parents d'aujourd'hui sont-ils les mêmes qu'autrefois ?
Maryse Vaillant : Pas vraiment. La vie professionnelle a changé : elle est prolongée et les grands-parents sont en meilleure forme. Auparavant, la ménopause et les petits-enfants transformaient les femmes en grands-mères. Maintenant, certaines d'entre elles ne se sentent pas prêtes à assumer ce rôle de grand-mère : elles nient ce statut et refusent leur nom de mamie. On choisit d'être parent, mais pas d'être grand parent. Et puis, il y a des profils très différents : il y a des grands-mères de 50 ans qui sont encore actives, qui ont envie de vivre pour elles-mêmes et d'autres de 80 ans qui sont plus posées et attendent impatiemment cette naissance.
PE. : Qu'est-ce qui a changé dans leur rôle ?
M. V. : Leurs conseils sont moins appliqués. Auparavant, les parents reproduisaient avec leurs enfants le modèle éducatif qu'ils avaient eux-mêmes reçu. Puis, dans les années 1970, ils ont fait l'inverse de leurs parents. Cependant aucune de ces méthodes n'était la bonne. Les parents d'aujourd'hui n'ont pas envie d'avoir de conseils, mais ne cherchent pas à dire aux grands-parents qu'ils ont tort. C'est une période charnière où les enfants acceptent un peu l'héritage mais cherchent des conseils ailleurs : auprès de spécialistes, de livres, d'Internet... Les grands-parents intelligents tiennent leur place, sont modérés, moins critiques. Ils sont disponibles pour garder les enfants, toutefois ils ne cherchent pas à entrer en compétition et savent se taire.
PE. : En quoi les relations avec les petits-enfants sont-elles si particulières ? Que peut-on faire avec eux que l'on ne pouvait pas faire avec ses enfants ?
M. V. : Tout ! On ne les a pas tout le temps avec soi. Lorsqu'ils repartent chez eux, on peut récupérer. Les grands-parents sont plus disponibles que lorsqu'ils étaient parents, surtout s'ils sont retraités. Ils ont moins de soucis, une rentrée d'argent fixe, moins de dépenses personnelles à faire. Ils peuvent passer une ou deux heures à jouer avec le petit ce qui est dur à faire pour une mère. C'est un rôle moins pesant mais pas plus facile car il faut respecter les règles fixées par les parents.
PE. : Les liens sont-ils les mêmes ?
M. V. : Je connais plein de grands-mères tombées en amour avec leur petit-enfant. Avec ce nouveau statut, elles ont retrouvé l'amour parental, l'émerveillement face à la petite enfance, une relation qu'elles avaient connue avec leur enfant mais qui s'était entachée avec l'adolescence. Cependant, le statut généalogique colore les relations. Les grands parents n'ont pas à éduquer leurs petits-enfants, mais davantage à profiter de leur compagnie.
PE. : En quoi ces liens sont-ils si importants dans la construction de l'enfant ?
M. V. : Celui-ci a besoin de savoir qu'il a des grands parents car ils sont ses racines. Il est important de penser qu'il n'est pas issu d'un couple et de rien d'autre. Il y a une toute-puissance des parents. Cela le repose de savoir qu'il a des racines ailleurs, que s'il est déçu par eux ou fâché, il y a d'autres personnes dans son entourage à qui se confier. Il n'est pas seul avec un couple. Cela le rassure, donne de la densité à la famille et enrichit son affectivité. C'est pourquoi il est important de l'habituer à communiquer avec ses grands-parents par lettre, par téléphone ou sms, car, même s'ils vivent loin, cela a le même effet psychique.
PE. : Quelle est la bonne distance à avoir avec ses petits-enfants ?
M. V. : Il faut respecter la place généalogique. On n'est pas les parents. Il ne faut pas acheter l'enfant en le gâtant, mais respecter les règles établies par les parents. Le petit-enfant ne doit pas non plus être le centre de la vie des grands-parents. Il est important qu'ils aient d'autres loisirs pour que leur vie ne soit pas entre parenthèses. Car si cette naissance est venue rompre leur solitude, l'enfant va grandir et s'éloigner à l'adolescence. Sa mission n'est pas de remplir le vide de la vie des grands-parents.
PE. : Les grands-parents sont les gardiens de l'histoire familiale. Comment se fait
cette transmission ?
M. V. : Par la parole, l'image... Les enfants adorent les récits sur le passé, les vieilles photos, qu'on leur parle d'un temps qui n'existe plus. Ils se demandent comment c'était avant eux, se posent des questions existentielles, philosophiques à leur manière. Avoir une histoire familiale leur donne de la force.
Conseils aux grands parents pour une bonne entente
1 Ne pas se prendre pour les parents.
2 Ne pas prendre le contre-pied éducatif.
3 Respecter les règles des parents (heure du coucher, repas...).
4 Ne pas faire de ses petits enfants le centre de sa vie.
5 Ne pas être intrusif.
6 Être disponible pour garder les petits-enfants.
7 Répondre aux demandes mais ne pas donner son avis si on ne vous le demande pas.
8 Garder les secrets des petits enfants pour qu'ils aient toujours la possibilité de se confier à quelqu'un.
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