Et si des bactéries étaient à l’origine du cancer du côlon ?

Si les cancers ne sont en aucun cas contagieux, l’apparition de certains d’entre eux peut être favorisée par des agents infectieux transmissibles. De plus en plus de données suggèrent notamment que certaines bactéries, capables de coloniser notre intestin, pourraient constituer un facteur de risque de cancer du côlon.
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Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, des agents infectieux seraient à l’origine de près d’un cancer sur cinq dans le monde. Le rôle du papillomavirus dans le développement des cancers du col de l’utérus, des virus de l’hépatite B et C dans celui des cancers du foie ou encore de la bactérie Helicobacter pylori dans la survenue de cancers de l’estomac, est désormais bien établi. Mais l’inventaire des cancers pouvant être induits par des virus ou des bactéries est probablement bien plus vaste qu’on ne l’avait imaginé.

Récemment, plusieurs études ont par exemple suggéré que des bactéries joueraient un rôle dans la survenue de certains cancers du côlon. L’ARC finance des travaux portant sur cette thématique : ceux du Dr Jean-Philippe Nougayrède* (Inserm, Toulouse). Ce chercheur a découvert qu’une bactérie, communément retrouvée dans la flore intestinale, pourrait augmenter le risque de cancer du côlon.

Le cancer du côlon est le plus fréquent des cancers touchant hommes et femmes. Chaque année en France, plus de 40 000 nouveaux cas sont diagnostiqués et la maladie emporte plus de 17 000 personnes. Comme pour tous les autres cancers, de nombreux facteurs peuvent intervenir dans son développement : des facteurs génétiques héréditaires, certaines maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, une alimentation riche en viande rouge et en charcuterie, le surpoids et l’obésité ou encore la consommation d’alcool et le tabagisme, connus pour augmenter la probabilité d’avoir un cancer du côlon. Les travaux de l’équipe toulousaine suggèrent qu’une toxine d’origine bactérienne pourrait s’ajouter à la liste.

Dès notre naissance, notre intestin est colonisé par des bactéries. Les plus connues de ces bactéries sont les Escherichia coli. Elles sont généralement inoffensives, voire bénéfiques au fonctionnement de notre organisme. Toutefois, certaines souches de E. coli possèdent des particularités génétiques qui les conduisent à produire des toxines. L’équipe de Jean-Philippe Nougayrède a étudié l’action d’une de ces toxines, la « colibactine ».

Il est apparu que cette substance produit d’importants dégâts dans l’ADN des cellules du côlon, semblables à ceux induits par des rayonnements radioactifs. Ce type de lésion de l’ADN pouvant constituer la première étape du processus qui conduit à la transformation de cellules saines en cellules cancéreuses, les résultats de ce travail suggèrent que la présence de bactéries produisant la toxine pourrait augmenter le risque de développer un cancer du côlon.

Cette hypothèse reste évidemment à confirmer et les chercheurs toulousains s’y attèlent actuellement. Si les travaux en cours venaient à confirmer cette hypothèse, la présence de cette souche bactérienne dans la flore intestinale pourrait être dépistée. Des traitements visant à l’éliminer seraient administrés le cas échéant. La mise au point d’un vaccin s’opposant à la colonisation de l’intestin par ces bactéries pourraient même être envisagée.

* équipe « Pathogénie moléculaire et cellulaire des infections à Escherichia coli »

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Source : ARC